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Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1458

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Cette seeonde version remontait peut-être à l’année précédente, car Henri Cazalis, de Strasbourg, en mai 1865, écrivait à Mallarmé : « Si tu veux m’être agréable, tu m’enverrais tes deux sonnets sur l’aumône (« Voilà einq franes, va boire ») et la naissance du poëte...» Cazalis était resté sous la fausse impression qu’il s’agissait d’un sonnet. Dans une lettre du 12 décembre 1863 à Albert Collignon, le directeur de la Rrzwe Nouvelle, Mallarmé disait : « Je vous envoie une très eourte terqa-rima. La pourrez-vous mettre dans votre seeond numéro ? » 11 se peut que ç’ait été ce poëme, le Guignon, autre tieree-rime, étant, sous sa forme complète, beaucoup plus long. Voiei, enfin, la version de 1866, telle qu’elle parut dans la livraison du 12 mai de eette année-là du Parnasse Contemporain : A UN PAUVRE Prends le sac. Mendiant. Longtemps tu cajolas — Ce vice te manquait — le songe d'être avare ? N'enfoui s pas ton or pour qu’il te sonne un glas. Évoque de l’Fjifer un péché plus bigarre. Tu peux ensanglanter les sales horizons Par une aile de Rêve, ô mauvaise fanfare ! An treillis apaisant les barreaux de prisons, Sur l'azur enfantin d’une chair éclaircie, Le tabac grimpe avec de sveltes feuillaisons. Et l’opium puissant brise la pharmacie ! Robes et peau, veux-tu lacérer le satin Et boire en la salive heureuse l’inertie, Par les cafés princiers attendre le matin ? Les plafonds enrichis de nymphes et de voiles, On jette, au mendiant de la vitre, un festin. Et quand tu sors, vieux dieu, grelottant sous les toiles D'emballage, l'aurore est un lac de vin d'or, Et tu jures avoir le gosier plein d'étoiles ! Tu peux même, pour tout reprendre ce trésor, Mettre une plume noire à ton feutre ; à compiles Offrir un cierge au Saint en qui tu crois encor Ne t’imagine pas que je dis des folies, Que le diable ait ton corps si tu crèves de faim, Je hais l’aumône utile et veux que tu m’oublies Et surtout, ne va pas, drôle, acheter du pain !