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Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/30

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s’appliquèrent en rien à disposer leurs dieux ou leurs héros en groupes et en classes. L’ordre dans lequel on range quelquefois ces mythes est l’œuvre d’un âge très-postérieur, et cet ordre, si nous y arrêtons notre esprit, nuira plus qu’il ne servira à l’effort fait par nous pour comprendre les légendes [1].

Cette science intéressante, la Mythologie, nous montre que les ancêtres des Germains ou des Norvégiens, des peuples latins ou des Grecs, subissaient, tous, les mêmes impressions, les mêmes espoirs et les mêmes craintes que nous aujourd’hui, malgré des différences inévitables ; et, somme toute, telle qu’elle était, chacune était belle et vraie. Au fond, je les vois, ces pensées, les mêmes qui inspirent le langage des poètes de tous les temps et de tous les pays. Oui, maintenant comme autrefois, les poètes ne font autre chose qu’attribuer la vie à ce qu’ils voient et à ce qu’ils entendent autour d’eux. Qu’importe l’image elle-même ? Tout au moins elle revêt, dans l’étude des mythes du passé, un charme historique qui est à la fois curieux et touchant. Qu’est le Soleil ? Un fiancé qui sort de sa chambre ou un héros qui se réjouit de parcourir sa route. Telle est l’idée qui fait le fond des légendes d’Héraclès, de Persée, de Thésée, d’Achille et de Bellérophon, et de beaucoup d’autres ; et tous les hommes d’à présent dont le cœur ou l’esprit sont ouverts à la beauté du ciel et de la terre, sentiront la séduction, spéciale et permanente à la fois, que comporte la Fable.

Passons maintenant à un point de vue très-différent et qu’il ne faut pas négliger. Grave question, la Mytho-

  1. Extrait d’une Préface de Cox.