Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/109

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dont la broderie verte indique l’Institut ; tel quel, il fait le tour du salon ; quoique bien laid, il sourit avec grâce ; il dit à chaque femme un mot, un mot d’esprit d’une qualité fine et rare.

Quels agréables souvenirs se ménagent les jeunes gens ! On jouit là d’une complète liberté ; la vie se dépense et se paie argent comptant ; nulle prétention, rien ne gêne l’essor des esprits. Les talents de Sophie Gay qui joue du piano et de la harpe en virtuose, son culte pour les arts et pour les lettres, l’égalité de son affection, donnent un charme unique à ces réunions. « Jamais, dit J. de Norvins, l’hospitalité de la civilisation n’avait eu cet attrait, cette couleur, ce caractère. » Franche gaîté, causerie imprévue, musique délicieuse concourent au plaisir. Un prince prie Sophie Gay de le faire dîner avec Musson, Musson, le mystificateur professionnel, l’air bonhomme et un peu lourd, dont l’œil éteint s’allume lorsqu’il a lâché quelque balourdise bien conditionnée. Le prince se voit présenter, au lieu de celui qu’il espérait connaître, un mineur, Goffin, qui a sauvé plusieurs de ses camarades et mérité la croix : il en porte une énorme, pendant jusqu’au bas de son gilet. Il parle houilles sans arrêter.

— Vient-il des femmes dans les mines ?

— Beaucoup. Elles paraissent blanches dans le charbon.

En partant, le prince dit à son hôtesse :

— Ce brave homme m’a beaucoup amusé, mais je crois que Musson me fera encore plus rire.

— Eh bien ! répond-elle, je vous promets de vous le faire revoir.