Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/114

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pas jusqu’à ce brave colonel Hulot qui n’ait employé le seul bras qui lui reste à sauver en se brûlant lui-même les femmes que le feu dévorait[1]. »

Cette constante activité mondaine ne l’empêche pas de surveiller de près l’éducation de ses filles. En pareille matière, elle ne prêche pas dogmatiquement la théorie : elle réalise la pratique. Ses idées sur l’éducation ont beau ne pas concorder avec celles de la docte Mme de Genlis : elle n’en a pas moins fait de ses filles des femmes remarquables, et de l’une d’elles une femme exceptionnelle. Comment s’y prend-elle ? Voici de quelle encre elle écrit, le 17 juin 1809, à sa fille Euphémie, « chez Mmes Mascarier, barrière Chaillot », à la veille de la première communion de l’enfant : « Reçois, ma chère enfant, toutes les bénédictions de mon cœur et les vœux qu’il forme pour ta félicité. Elle sera durable si tu conserves les bons sentiments qui remplissent en ce moment ton âme ; car le malheur n’atteint jamais complètement ceux que leurs vertus font chérir. Sois douce, mon Euphémie, et surtout indulgente ; apprends de bonne heure à sacrifier les intérêts de ton amour-propre aux petites faiblesses des gens qui voudront t’humilier. Venge-toi de l’injure par le bienfait, et, ce qui est peut-être plus difficile encore, de l’impolitesse par l’obligeance ; et tu verras que le ciel récompense généralement tous les sacrifices que le devoir impose par le plaisir d’avoir mérité sa protection, et le charme d’être aimé de tout ce

  1. Lettre de Sophie Gay à Mme de Grécourt, 8 juillet 1810, arch. Du Manoir de Juaye. — L. Grasilier : l’Incendie de l’hôtel de l’ambassade d’Autriche, extr. le Vieux Montmartre, fasc. 79, 1913-1918, p. 263-295.