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Corinne au cap Misène, qui ornera le salon de l’Abbaye-aux-Bois[1].

Sophie Gay escomptait la venue d’une troupe de comédiens français ; hélas ! Aix-la-Chapelle est rentrée dans le domaine du roi de Prusse, et l’empereur d’Autriche estime que de telles représentations constitueraient une mesure antigermanique : il s’y oppose. On en sera réduit à se moquer des burlesques acteurs patronnés par ces deux monarques de peu de goût. Et notre auteur déploie toute sa verve à se donner le plaisir, assez piquant, « de jouer le rôle d’une bonne Française à la barbe de tous ces Cosaques ». Si seulement le comte Decazes venait ! Il amènerait Villemain et Vatout, deux familiers du salon de la rue des Mathurins. Sophie Gay le souhaite vivement : « Les grands seigneurs me ragoûtent d’autant plus des gens d’esprit, et je descendrais sans le moindre regret des beaux équipages où l’on me traîne avec six chevaux dans la ville, pour m’y promener, bras dessus, bras dessous, avec un homme de lettres aimable. Je n’ai pas plus de vanité que cela. »

Est-ce l’ostracisme prononcé contre les comédiens français par l’empereur d’Autriche ? La Sérénade ne sera pas jouée. Elle est « au croc », écrit Sophie Gay à Sophie Gail le 10 septembre, en la pressant de venir et lui offrant l’hospitalité. « Mon mari fait déjà provision du meilleur thé pour le prendre

  1. Ed. Herriot : Madame Récamier, Paris, 1904, deux volumes in-8o. II, p. 55. — Turquan ; Madame Récamier, p. 113. — Lettres de Sophie Gay, dans L. Séché : Muses romantiques, Delphine Gay (Mme de Girardin) dans ses rapports avec Lamartine, etc., Paris, 1910, in-8o, p. 16, 33.