Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tout le monde, il rit aussi de lui-même et déconcerte la moquerie par son esprit à y répondre. Pour moi, j’ai réussi a le mettre en colère, un jour qu’il me soutenait que l’italien n’est pas une langue. Après qu’il eut épuisé toutes les injures, je lui dis : « Il n’y a rien de plus désolant que de se disputer avec un homme médiocre ». Mon trait porta coup. « C’est la reine de l’injure », dit-il de moi ensuite. — C’est effectivement, remarque Béranger, une des plus cruelles : on ne sait jamais si elle est méritée ou non[1] !

Le même Jouy donne chez Girodet un échantillon de sa critique d’art. On examine la Galathée fraîchement peinte. Il y a là Humboldt, le comte de Forbin, le général Lejeune, le colonel Longuerue, Coulmann et Sophie Gay. Comme dit Humboldt, Jouy « fait beaucoup de moutarde » à propos de l’Amour : il est fort mal pendu, et le tableau manque de simplicité ; cette électricité ne vaut rien ; nos grands maîtres n’employaient pas de tels moyens ; si Galathée est bien dessinée, elle a l’air trop française ; le dessin de Pygmalion ne vaut rien ; il a un derrière qui ne suffit pas à l’usage ordinaire de la vie ; on voit que l’Amour a été effacé trois ou quatre fois ; il semble sortir d’un bocal d’esprit-de vin, etc. Le général Lejeune, auteur de cette curieuse série de tableaux des guerres de l’Empire que l’on peut voir au musée de Versailles, pallie ces critiques en affirmant que la peinture est si parfaite, si finie, qu’on peut la regarder à la loupe. Effectivement, il

  1. Coulmann : Réminiscences, I, 283-287. — Jal : Souvenirs d’un homme de lettres, p. 472.