Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/184

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Un jour pareil à celui-là, la belle jeune fille aux boucles blondes, aux yeux couleur de ciel, à la blanche robe de mousseline, erre à pas lents dans la grande allée de peupliers. Sa gaîté rieuse s’éteint au coin de ses lèvres. Une douce mélancolie voile son front rêveur. Elle a seize ans. Une élégie monte de son cœur à ses lèvres :

     Jeune fille, où vas-tu si tard ?
     D’où vient qu’à travers la vallée
     Tu portes tes pas au hasard ?
  Pourquoi les égarer dans cette sombre allée ?

Ainsi commence la Noce d’Elvire, timbrée d’une épigraphe de Mme Dufrénoy. La pièce est datée de septembre 1820.

Sa mère s’inquiète de cette vocation littéraire qui s’annonce. Elle en connaît trop les risques et les inconvénients. Elle en connaît aussi les joies, et n’en détourne pas sa fille. Mais elle lui donne deux conseils : « Si tu veux qu’on te prenne au sérieux, donnes-en l’exemple, étudie la langue à fond, pas d’à-peu-près, remontres-en à ceux qui ont appris le latin et le grec. » Et deuxièmement : « N’aie dans ta mise aucune des excentricités des bas-bleus ; ressemble aux autres par ta toilette, ne te distingue que par ton esprit ». Delphine, tendre orgueil de sa mère, lui voue un touchant amour. Elle suit ses conseils de point en point. Enthousiaste de Racine, elle étudie la poésie avec Alexandre Soumet, la prose avec Villemain. Elle apprend le latin. Pas une de ses œuvres qu’elle ne documente sérieusement : pour son poème de la Magdeleine, elle se plonge dans l’histoire des Hébreux, et s’informe des termes