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de son mari. Elle était jeune, jolie, pétrie d’esprit. Ses réceptions obtinrent un tel succès que les baigneurs de Spa venaient à Aix pour y assister.

En dépit de sa jeunesse, elle avait déjà une histoire. Naguère encore, elle figurait au peloton de tête de l’escadron des plus belles femmes du Directoire, et elle publiait des romans[1].

Son père, Augustin-François Nichault de La Valette[2], financier de profession, était attaché à la maison de Monsieur ; il mourut fonctionnaire des domaines nationaux. Il épousa une femme d’une rare beauté, une Lyonnaise d’origine florentine, Antoinette-Françoise Péretti, de l’illustre famille qui donna un pape à la chrétienté. Ils eurent entre autres enfants une fille, Marie-Françoise-Sophie, née le 1er  juillet 1776.

Ami des philosophes, enthousiaste de leurs principes, le financier apprend à sa fille, — elle s’en targuera plus tard, — à juger du motif qui conduit leur plume ; il les lui montre bravant toutes les puissances « pour chercher la vérité et frapper de sa lumière ceux qui s’obstinent à la méconnaître[3] ». Et, pour commencer, il la porte, bébé de deux ans, au triomphateur d’Irène. Est-ce le baiser de Voltaire qui lui donnera cet esprit endiablé dont elle ne se départira pas de toute son existence ? Dès sa première communion, elle lance un de ces mots, qui, suivant l’expression de la comtesse Merlin,

  1. On trouve aussi l’orthographe Michault, mais sur l’acte de baptême de Sophie, Michault a été corrigé en Nichault.
  2. Sainte-Beuve : Lundis, III, p. 297.
  3. Sophie Gay : Laure d’Estell, Paris, 1802, in-8o, p. 82.