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EN FAMILLE.

— Comment cela ?

— J’en ai plus besoin pour l’orthographe des mots français que pour le sens des mots anglais, un dictionnaire français le remplacera très bien. »

Elle le sentait sur son dos, et bien qu’elle ne pût pas voir ses yeux n’osant pas se retourner, elle devinait qu’ils lisaient par-dessus son épaule.

« C’est la lettre de Dakka que vous traduisez ? »

Elle fut surprise qu’il connût cette lettre qui devait rester si rigoureusement secrète. Mais tout de suite elle réfléchit que c’était peut-être pour la connaître qu’il l’interrogeait, et cela paraissait d’autant plus probable que le dictionnaire semblait être un prétexte : pourquoi aurait-il besoin d’un dictionnaire anglais-français puisqu’il ne savait pas un mot d’anglais ?

« Oui, monsieur, dit-elle.

— Et cela va bien cette traduction ? »

Elle sentit qu’il se penchait sur elle, car il avait la vue basse ; alors vivement elle tourna son papier de façon à ce qu’il ne le vît que de côté.

« Oh ! je vous en prie, monsieur, ne lisez pas, cela ne va pas du tout, je cherche,… c’est un brouillon.

— Cela ne fait rien.

— Si, monsieur, cela fait beaucoup, j’aurais honte. »

Il voulut prendre la feuille de papier, elle mit la main dessus ; si elle avait commencé à se défendre par un moyen détourné, maintenant elle était résolue à faire tête, même à l’un des chefs de la maison.

Il avait jusque-là parlé sur le ton de la plaisanterie, il continua :