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SANS FAMILLE

J’étais à deux genoux sur la terre, appuyé sur mes mains, le nez baissé dans mes topinambours, quand j’entendis crier mon nom d’une voix impatiente. C’était Barberin qui m’appelait.

Que me voulait-il ?

Je me hâtai de rentrer à la maison.

Quelle ne fut pas ma surprise d’apercevoir devant la cheminée Vitalis et ses chiens.

Instantanément je compris ce que Barberin voulait de moi.

Vitalis venait me chercher, et c’était pour que mère Barberin ne pût pas me défendre que le matin Barberin l’avait envoyée au village.

Sentant bien que je n’avais ni secours ni pitié à attendre de Barberin, je courus à Vitalis :

— Oh ! monsieur, m’écriai-je, je vous en prie, ne m’emmenez pas.

Et j’éclatai en sanglots.

— Allons, mon garçon, me dit-il assez doucement, tu ne seras pas malheureux avec moi, je ne bats point les enfants, et puis tu auras la compagnie de mes élèves qui sont très-amusants. Qu’as-tu à regretter ?

— Mère Barberin ! mère Barberin !

— En tous cas, tu ne resteras pas ici, dit Barberin, en me prenant rudement par l’oreille ; monsieur ou l’hospice, choisis !

— Non ! mère Barberin !

— Ah ! tu m’ennuies à la fin, s’écria Barberin, qui se mit dans une terrible colère ; s’il faut te chasser d’ici à coups de bâton, c’est ce que je vas faire.