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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/240

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SANS FAMILLE

auraient bien trouvé le moyen de mettre le terrible padrone dans l’impossibilité de rien entreprendre contre son neveu.

Si j’avais eu un moment d’émotion cruelle chez Chopinet, l’espérance maintenant m’était revenue ; j’allais trouver Barberin à l’hôtel du Cantal.

Sans plus tarder je me dirigeai vers le passage d’Austerlitz, plein d’espérance et de joie et par suite de ces sentiments sans doute, tout disposé à l’indulgence pour Barberin.

Après tout, il n’était peut-être pas aussi méchant qu’il en avait l’air : sans lui je serais très-probablement mort de froid et de faim dans l’avenue de Breteuil ; il est vrai qu’il m’avait enlevé à mère Barberin pour me vendre à Vitalis, mais il ne me connaissait pas, et dès lors il ne pouvait pas avoir de l’amitié pour un enfant qu’il n’avait pas vu, et puis il était poussé par la misère, qui fait faire tant de mauvaises choses. Présentement il me cherchait, il s’occupait de moi, et si je retrouvais mes parents, c’était à lui que je le devais : cela méritait mieux que la répulsion que je nourrissais contre lui depuis le jour où j’avais quitté Chavanon, le poignet pris dans la main de Vitalis. Envers lui aussi je devrais me montrer reconnaissant : si ce n’était point un devoir d’affection et de tendresse comme pour mère Barberin, en tout cas c’en était un de conscience.

En traversant le Jardin des Plantes, la distance n’est pas longue de la rue de Lourcine au passage d’Austerlitz, je ne tardai pas à arriver devant l’hôtel du Cantal, qui n’avait d’un hôtel que le nom, étant en réalité