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SANS FAMILLE

temps accablé, réfléchissant à ma triste condition, mais sans suite, car il m’était impossible de joindre deux idées et de passer de l’une à l’autre.

Combien le présent était terrible, combien l’avenir était effrayant !

« Bon courage, m’avait dit Mattia, nous ne t’abandonnerons pas » ; mais que pouvait un enfant comme Mattia ? que pouvait même un homme comme Bob, si celui-ci voulait bien aider Mattia ?

Quand on est en prison, on n’a qu’une idée fixe, celle d’en sortir.

Comment Mattia et Bob pouvaient-ils, en ne m’abandonnant pas et en faisant tout pour me servir, m’aider à sortir de ce cachot ?

J’allai à la fenêtre et l’ouvris pour tâter les barreaux de fer qui, en se croisant, la fermaient au dehors : ils étaient scellés dans la pierre ; j’examinai les murailles, elles avaient près d’un mètre d’épaisseur ; le sol était dallé avec de larges pierres ; la porte était recouverte d’une plaque de tôle.

Je retournai à la fenêtre ; elle donnait sur une petite cour étroite et longue, fermée à son extrémité par un grand mur qui avait au moins quatre mètres de hauteur.

Assurément on ne s’échappait pas de cette prison, même quand on était aidé par des amis dévoués. Que peut le dévouement de l’amitié contre la force des choses ? le dévouement ne perce pas les murs.

Pour moi, toute la question présentement était de savoir combien de temps je resterais dans cette prison, avant de paraître devant le magistrat qui déciderait de mon sort.