Aller au contenu

Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/422

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
414
SANS FAMILLE

d’être heureux, et cette visite est fixée à demain.

— Eh bien, dit Lise en entrant, que se passe-t-il donc ? on se cache de moi ; on se parle en cachette ; Arthur vient de partir pour la station de Chegford, le break a été envoyé à celle de Ferry, quel est ce mystère, je vous prie ?

Nous sourions, mais nous ne lui répondons pas.

Alors elle passe un bras autour du cou de ma mère, et l’embrassant tendrement :

— Puisque vous êtes du complot, chère mère, dit-elle, je ne suis pas inquiète, je suis sûre à l’avance que vous avez, comme toujours, travaillé pour notre bonheur, mais je n’en suis que plus curieuse.

L’heure a marché, et le break que j’ai envoyé à Ferry au-devant de la famille de Lise, doit arriver d’un instant à l’autre ; alors, voulant jouer avec cette curiosité, je prends une longue-vue qui nous sert à suivre les navires passant au large, mais, au lieu de la braquer sur la mer, je la tourne sur le chemin par où doit arriver le break.

— Regarde dans cette longue-vue, lui dis-je, et ta curiosité sera satisfaite.

Elle regarde, mais sans voir autre chose que la route blanche, puisqu’aucune voiture ne se montre encore.

Alors, à mon tour, je mets l’œil à l’oculaire :

— Comment n’as-tu rien vu dans cette lunette ? dis-je du ton de Vitalis faisant son boniment ; elle est vraiment merveilleuse : avec elle je passe au-dessus de la mer et je vais jusqu’en France ; c’est une coquette maison aux environs de Sceaux que je vois,