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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/423

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SANS FAMILLE

un homme aux cheveux blancs presse deux femmes qui l’entourent : « Allons vite, dit-il, nous manquerons le train et je n’arriverai pas en Angleterre pour le baptême de mon petit-fils ; dame Catherine, hâte-toi un peu, je t’en prie, depuis dix ans que nous demeurons ensemble tu as toujours été en retard. Quoi ? que veux-tu dire, Étiennette ? voilà encore mademoiselle gendarme ! Le reproche que j’adresse à Catherine est tout amical. Est-ce que je ne sais pas que Catherine est la meilleure des sœurs, comme toi, Tiennette, tu es la meilleure des filles ? où trouve-t-on une bonne fille comme toi, qui ne se marie pas pour soigner son vieux père, continuant grande le rôle d’ange gardien qu’elle a rempli enfant, avec ses frères et sa sœur ? » Puis avant de partir il donne des instructions pour qu’on soigne ses fleurs pendant son absence : « N’oublie pas que j’ai été jardinier, dit-il à son domestique, et que je connais l’ouvrage. »

Je change la lunette de place comme si je voulais regarder d’un autre côté :

— Maintenant, dis-je, c’est un vapeur que je vois, un grand vapeur qui revient des Antilles et qui approche du Havre : à bord est un jeune homme revenant de faire un voyage d’exploration botanique dans la région de l’Amazone ; on dit qu’il rapporte tout une flore inconnue en Europe, et la première partie de son voyage, publiée par les journaux, est très-curieuse ; son nom, Benjamin Acquin, est déjà célèbre ; il n’a qu’un souci : savoir s’il arrivera en temps au Havre pour prendre le bateau de Southampton et rejoindre sa famille à Milligan-Park ; ma lunette est tel-