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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 2.djvu/425

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SANS FAMILLE

qu’à nous, puis presque aussitôt un second ; nous courons à la fenêtre et nous apercevons le break dans lequel Lise reconnaît son père, sa tante Catherine, sa sœur Étiennette, ses frères Alexis et Benjamin ; près d’Alexis est assis un vieillard tout blanc et voûté, c’est le magister. Du côté opposé, arrive aussi le landau découvert dans lequel Mattia et Cristina nous font des signes de mains. Puis, derrière le landau, vient un cabriolet conduit par Bob lui-même ; Bob a toute la tournure d’un gentleman, et son frère est toujours le rude marin qui nous débarqua à Isigny.

Nous descendons vivement l’escalier pour recevoir nos hôtes au bas du perron.

Le dîner nous réunit tous à la même table, et naturellement on parle du passé.

— J’ai rencontré dernièrement à Bade, dit Mattia, dans les salles de jeu, un gentleman aux dents blanches et pointues qui souriait toujours malgré sa mauvaise fortune ; il ne m’a pas reconnu, et il m’a fait l’honneur de me demander un florin pour le jouer sur une combinaison sûre ; c’était une association ; elle n’a pas été heureuse : M. James Milligan a perdu.

— Pourquoi racontez-vous cela devant Rémi, mon cher Mattia ? dit ma mère ; il est capable d’envoyer un secours à son oncle.

— Parfaitement, chère maman.

— Alors où sera l’expiation ? demanda ma mère.

— Dans ce fait que mon oncle qui a tout sacrifié à la fortune, devra son pain à ceux qu’il a persécutés et dont il a voulu la mort.