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Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/60

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dès nos premières représentations nous eûmes un public nombreux.

Par malheur, l’homme de police qui avait la garde de cette allée, vit cette installation avec déplaisir, et, soit qu’il n’aimât pas les chiens, soit que nous fussions une cause de dérangement dans son service, soit toute autre raison, il voulut nous faire abandonner notre place.

Peut-être, dans notre position, eût-il été sage de céder à cette tracasserie, car la lutte entre de pauvres saltimbanques tels que nous et des gens de police n’était pas à armes égales, mais mon maître n’en jugea pas ainsi.

Bien qu’il ne fût qu’un montreur de chiens savants pauvre et vieux, – au moins présentement et en apparence, il avait de la fierté ; de plus il avait ce qu’il appelait le sentiment de son droit, c’est-à-dire, ainsi qu’il me l’expliqua, la conviction qu’il devait être protégé tant qu’il ne ferait rien de contraire aux lois ou aux règlements de police.

Il refusa donc d’obéir à l’agent lorsque celui-ci voulut nous expulser de notre allée.

Lorsque mon maître ne voulait pas se laisser emporter par la colère, ou bien lorsqu’il lui prenait fantaisie de se moquer des gens, – ce qui lui arrivait souvent, – il avait pour habitude d’exagérer sa politesse italienne : c’était à croire alors, en entendant ses façons de s’exprimer, qu’il s’adressait à des personnages considérables.

– L’illustrissime représentant de l’autorité, dit-il