Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/93

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en sûreté, il était resté blotti, sans répondre à nos appels.

La pauvre petite bête, si frileuse, devait être glacée.

Mon maître l’appela doucement, mais il ne bougea pas plus que s’il était mort.

Pendant plusieurs minutes, Vitalis répéta ses appels : Joli-Cœur ne donna pas signe de vie.

J’avais à racheter ma négligence de la nuit.

– Si vous voulez, dis-je, je vais l’aller chercher.

– Tu vas te casser le cou.

– Il n’y a pas de danger.

Le mot n’était pas très-juste ; il y avait danger, au contraire, surtout il y avait difficulté ; l’arbre était gros, et de plus il était couvert de neige dans les parties de son tronc et de ses branches qui avaient été exposées au vent.

J’avais appris de bonne heure à grimper aux arbres et j’avais acquis dans cet art une force remarquable. Quelques petites branches avaient poussé le long du tronc ; elles me servirent d’échelons, et, bienque je fusse aveuglé par la neige que mes mains me faisaient tomber dans les yeux, je parvins bientôt à la première fourche. Arrivé là, l’ascension devenait facile ; je n’avais plus qu’à veiller à ne pas glisser sur la neige.

Tout en montant, je parlais doucement à Joli-Cœur, qui ne bougeait pas, mais qui me regardait avec ses yeux brillants.

J’allais arriver à lui et déjà j’allongeais la main pour le prendre, lorsqu’il fit un bond et s’élança sur une autre branche.