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Page:Mandat-Grancey La brèche aux buffles - 1889.djvu/255

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la brèche aux buffles.

boys galopent sur les flancs de la colonne, le grand chapeau écrasé sur la nuque, debout sur leurs larges étriers de bois, leurs pantalons et leurs jaquettes en cuir rouge se détachant sur la neige. Raymond ferme la marche. Bientôt l’avant-garde s’engage dans le cañon. Nous nous y engouffrons à sa suite. De loin nous voyons D…, dont le petit cheval gris bondit comme un chat au milieu des rochers. De temps en temps, quand on arrive à l’un des petits bassins formés par les eaux au bas des cascades, il hésite un instant avant de trouver la fissure qui permet de continuer la route. Quelquefois elle est si peu apparente, que les chevaux de tête refusent de s’y engager à sa suite. Alors tous les autres s’arrêtent en une masse confuse, chacun appuyant sa tête sur le dos de l’autre : les juments rappelant leurs poulains par un petit hennissement très doux et très expressif. Les cow-boys qui sont en queue chargent en poussant de grands cris. Les premiers se décident alors à bondir en avant, s’accrochant aux moindres aspérités du rocher, et tous les autres les suivent.

En moins d’une heure nous traversons le cañon. Il fait déjà presque nuit quand nous arrivons en vue du ranch. Les chevaux sont poussés dans la clôture et conduits sur le bord du ruisseau, en haut de la vallée, derrière les écuries, où les pauvres bêtes pourront trouver, en grattant la neige, de quoi manger un peu pendant la nuit. On ne peut pas les lâcher, car elles ne portent pas encore notre marque. D’un autre côté, il est un peu dangereux de les garder dans une clôture en ronces artificielles qu’elles ne connaissent pas et sur lesquelles, étant donné leur état d’inquiétude, elles vont peut-être se jeter cette nuit. Aussi