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la brèche aux buffles.

Les fermiers de ce pays commencent donc à ressentir, à leur tour, toutes les douceurs de la crise qu’ils ont déchaînée chez nous. Mais, pour eux, cette crise ne sera que temporaire. Ils ne doivent plus, il est vrai, compter sur l’exportation de leurs produits, mais la perte qui résulte pour eux de la fermeture du marché européen sera bien vite compensée par suite de ce fait que leur marché national va tous les jours s’élargissant grâce à l’augmentation de la population. L’émigration du vieux monde n’a jamais été aussi considérable que cette année. Le 13 juin dernier, je crois, la douane a enregistré l’arrivée à New-York de onze mille émigrants dans la même journée ! Tant par l’émigration que par les naissances, la population augmente chaque année de deux millions cinq cent mille unités environ. Et ce marché-là, les Américains sauront bien le conserver à leurs propres agriculteurs à force de protection ; car une chose que l’on ne sait pas assez, c’est que ces années dernières, alors que leurs diplomates protestaient contre les droits que nous voulions mettre sur leurs blés, il y avait un article de leurs tarifs douaniers qui imposait d’un droit assez fort l’introduction des blés étrangers chez eux ; droit que leurs douaniers n’avaient du reste, bien entendu, jamais l’occasion d’appliquer.

Me voilà au bout de ma monographie ! Aurai-je bien mérité de la « Réforme sociale » ? Je l’espère. Mais j’ai peur d’avoir donné aux lecteurs une assez mauvaise idée de mes pauvres voisins les Rogers. Le mari est bien sale, et la femme a un passé un peu suspect. Mais j’ai appris ce soir sur leur compte une histoire que je veux consigner ici, d’abord parce qu’elle démontre une fois de plus qu’il ne faut pas toujours se fier ici