Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/114

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— Ah !… si vous saviez comme je souffre d’être laide !

Clarel n’osa répondre, dédaignant les protestations hypocrites, les consolations inutiles. Alors, Thérèse continua :

— Je vous remercie, Francine : vous n’avez pas dit bêtement : « Ce n’est que ça qui cause vos larmes : vous n’êtes pas raisonnable ! » Je vous remercie de me comprendre… Je vous avais dissimulé jusqu’ici ce qui est la plaie de mon existence. J’affectais la résignation ; j’étais la première à rire de ma laideur, à la façon d’un amputé qui plaisante devant le baquet où gît sa jambe sectionnée, mais qui sanglotera désespérément, dès que le chirurgien sera parti…

Clarel objecta doucement :

— Toutes les femmes ne sont pas belles ; et cependant, toute femme possède sa séduction.

— Justement : moi, je n’ai pas même le charme…

— Vous êtes une artiste de grande valeur ; votre talent est admiré des meilleurs peintres ; qui plus est : vos toiles s’achètent… et vous