Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/15

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mieux contre cette avalanche de bouquins. Les volumes encore empaquetés tournoyaient devant ses yeux et les étiquettes des librairies semblaient rivaliser d’adresse. Il reçut un Plon sur l’épaule et un Ollendorff en plein estomac ; à peine s’était-il garé, qu’un Fasquelle sournois le frappait en traître par derrière.

Maxime ramassa posément chaque projectile, et murmura avec un sourire :

— Voilà la revanche des livres… C’est bien leur tour : j’ai si souvent tapé sur eux !

C’était dans la salle de rédaction du journal. Les deux collaborateurs littéraires avaient envahi les « Informations politiques » : une longue pièce rectangulaire, égayée d’ampoules électriques et de caricatures fichées aux murs par quatre punaises. Trois jeunes gens fumaient, adossés à la cheminée, et plaisantaient avec Fargeau et Lorderie, tandis qu’un vieux rédacteur sexagénaire persistait à travailler, penché sur sa table, méditant les dépêches de l’étranger, sabrant les morasses de deleatur rageurs, et, de temps en temps, grognait dans sa barbe blanche :