Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/159

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l’énigme : depuis que la manie du syndicat a envahi jusqu’aux gens de service, les maîtres se voient contraints de bien payer s’ils veulent être bien traités. Madame Lorderie tournait ainsi la difficulté : de janvier à fin mars — la période de ses réceptions — elle engageait une cuisinière et une femme de chambre impeccables qui lui faisaient honneur devant ses connaissances et qu’elle rétribuait grassement. Dès les premiers jours d’avril, madame Lorderie avait ses nerfs, et congédiait ses domestiques l’une après l’autre, pour la moindre peccadille. Alors, c’était, dans la maison, une succession de boniches à trente-cinq francs, qui découchaient, buvaient, paressaient, et que l’on devait chasser tous les huit jours : ce manège durait trois mois. Une semaine avant de partir en villégiature, madame Lorderie cessait de courir les bureaux de placement et ne reprenait des bonnes qu’à la rentrée ; puis, invoquant un grief véniel, elle les renvoyait dans la seconde quinzaine de décembre afin d’économiser leurs étrennes.

La conversation de Denise n’était plus qu’un