Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/204

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La jeune femme lui lança un regard oblique, perfide, malicieux ; et riposta doucement :

— Alors, c’est moi qui ai des torts envers toi… Tout à coup, je me suis aperçue que j’avais cessé de t’aimer, Jacques ; j’ai découvert une chose beaucoup plus grave : j’étais éprise d’un de tes amis. Je connais la loyauté des amitiés masculines et le respect que vous professez à l’égard de vos maîtresses, lorsqu’elles sont respectables… J’étais sacrifiée d’avance à deux sentiments : ton estime pour moi ; ton affection pour ton ami. Jamais je ne t’aurais causé la douleur de te tromper avec un vieux camarade ; jamais tu n’aurais eu l’abnégation — ou la bassesse — de me céder à ton plus cher compagnon : nous nous serions méprisés tous les trois, après un pareil marché… Et c’est pourquoi je t’ai quitté, afin d’oublier le caprice que m’avait inspiré monsieur Maxime Fargeau.

Lorderie ne manquait pas d’esprit mais il était totalement dépourvu de finesse. Il ne comprit goutte ; ne soupçonna ni ne chercha la moindre allusion.