Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/258

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

t’avouerai que j’ai craint, que je crains encore, d’exciter ses soupçons par mon attitude contrainte… J’ai différé jusqu’à présent le moment de la revoir, d’affronter son examen, ses questions… J’ai peur que le trouble que j’éprouve en face d’elle ne m’empêche de bien mentir.

— Ne t’inquiète donc pas… Les événements mentent pour toi : la vérité s’admet quelquefois à grand’peine, mais on croit tout de suite aux faux semblants. Francine est déjà persuadée que tu as accompli son dessein ; nous nous affectionnons trop profondément pour qu’elle impute notre rupture à une autre cause que la plus grave… le flagrant délit manigancé par elle. Songe donc que ma femme… Oui, Denise elle-même, ajoute foi à notre comédie. Elle est sûre — quoi que je prétende — d’être l’objet du malentendu qui nous désunit, et ne cesse de me harceler à ce sujet depuis qu’un imbécile lui a colporté les bruits qui courent sur nous… Ma foi, son erreur est assez naturelle.

Lorderie s’égaya soudain à quelques souvenirs et continua goguenard :

— Tout le monde est tombé dans le piège…