Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/307

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lui qu’elle traitait ainsi ? Exacerbé d’énervement, Fargeau questionna d’une voix tremblante :

— Qui ?… ma chère aimée… Qui est-ce qui est un misérable ?

— Mallet, parbleu !… Aujourd’hui, sans crier gare, il me prévient qu’il a décidé de me reculer d’un mois… Mon livre ne paraîtra qu’à la fin de mars. Oh ! Mais vous savez, il me payera ça… Jamais je ne remettrai les pieds dans sa librairie ; je porterai mon prochain bouquin à l’un de ses confrères — qui cherche, du reste, à m’attirer chez lui… On a tout intérêt à changer d’éditeurs : on y gagne des droits d’auteur plus élevés… c’est le principe de la concurrence. Mallet m’a manqué de parole : voilà une chose que je ne peux souffrir. Heureusement que je n’ai pas de traité avec lui ; moi, d’ailleurs, on ne me retient que grâce aux traités : j’ai l’humeur vagabonde…

Maxime pensa : « Ça y est : elle est déchaînée ! » Résigné, il s’écroula dans un fauteuil. Il n’y avait rien à faire, rien à dire. Il la connaissait trop ; il eût été périlleux de l’interrompre ; elle aurait tourné sa colère contre lui.