Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/310

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travail m’en rapproche chaque jour. Chacun de mes efforts fut un peu de terrain gagné… Je ne suis pas heureuse ; je ne suis pas aimée ; mais je serai ce que je veux être… Voilà pourquoi, mon ami, vous me voyez me soucier de mon libraire à l’heure où l’on ne doit songer qu’au berger… Ma carrière, c’est ma raison d’être : tout le reste m’a désabusée… Je suis vieille, Fargeau : je viens d’avoir vingt-cinq ans, mais j’ai déjà trop vécu… Mon cœur est ratatiné comme une pomme sèche.

Maxime la serrait contre lui ; insidieux, il commençait de dégrafer le corsage de la jeune femme, profitant de son attendrissement pour la désarmer sournoisement au cas où elle aurait la lubie d’une résistance. Il s’accoutumait peu à peu à ses revirements — et s’en défiait.

Francine continua :

— Je désire vous aimer… Vous êtes l’homme qui a fait deux choses extraordinaires pour moi. Nous pourrions réaliser l’union parfaite… Efforcez-vous de me plaire, Maxime : il me semblerait que je ressuscite, si je parvenais à dépouiller ma froideur, à oublier enfin cette peur