Page:Marais - Les Trois Nuits de Don Juan.djvu/86

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— tel un chien mord le maître inconnu ; — et méditant longuement sa défaite insolite.

Aujourd’hui, il se sentait irrémédiablement vaincu malgré sa résistance illusoire. Il aimait Francine Clarel de cette passion unique et profonde qui traverse une seule fois notre vie et que nous persistons à nier, avant de l’avoir éprouvée — ou inspirée. Il l’eût aimée, même docile et conquise… Qu’était-ce, à présent qu’elle lui apparaissait rebelle, insensible, mauvaise — adorable ? À la longue, Francine l’eût peut-être blasé, si elle avait cédé tout de suite… Il était à jamais subjugué par ce double prodige : une femme indifférente à sa séduction… une maîtresse capable d’être fidèle à son amant… Pour achever la situation, Clarel affichait des mœurs dissolues, des opinions licencieuses… Elle s’était refusée par plaisir, non par principes… Il n’avait même point la compensation de s’être incliné devant une vertu… C’était son propre vice qui faisait la nique à don Juan… Elle l’exaspérait et le harcelait… Il rêvait tour à tour de se rouler aux pieds de Francine ou de la rouer de coups… Des pro-