Page:Marais - Pour la bagatelle.djvu/140

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sensuelle exprimée par une pantomime grotesque… et ta répugnance naturelle de femme délicate te protégera plus sûrement que la peur du péché. Je t’ai suffisamment désabusée pour que tu ne te laisses pas abuser. Il existe deux morales : celles des yeux baissés et celle des yeux ouverts ; j’estime qu’on risque moins de trébucher quand on sait regarder l’obstacle. La jeune fille est née pour aimer, et l’on veut qu’elle ignore le cœur humain ; pour enfanter, et on lui cache le mystère de la conception. Sa conscience arrive au mariage plus voilée qu’une fiancée arabe… Quel non-sens ! Et, à notre époque qui se signale par cette licence de mœurs et cette ivresse de jouissances qui succèdent toujours aux temps troublés, le sort des filles à marier n’a rien d’enviable : toute une génération d’Européens au plus bel âge de l’homme est fauchée par la guerre. Les fillettes pauvres sont vouées au célibat et les héritières se disputent des militaires liber-