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Page:Marais - Pour le bon motif.djvu/113

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Denise se mordait les lèvres pour réprimer une crise de fou rire. Mais lorsqu’il se tut, elle dit gravement, sur un ton d’émotion contenue :

— Si vous saviez combien l’effort — surtout l’effort malheureux — m’inspire d’estime et de sympathie !

Son interlocuteur leva les yeux sur elle : il y avait dans son regard une surprise émue, une fierté, une incertitude qui touchèrent Denise, en dépit de ses résolutions : une amertume de vingt-deux ans n’est jamais cimentée d’un mortier bien résistant ; à la première attaque, la façade s’effrite.

Ils causèrent. Dès cette première entrevue, Denise établit une ambiance de sourde intimité et de tendre intérêt. À son tour, il l’interrogeait ; il lui demanda son nom.

— Denise Tardivet.

Elle ajouta, en scrutant sa physionomie :

— Mon père est caissier à la banque Salmon.

Il ne broncha pas.

Denise, qui s’y connaissait en duplicité, jugea l’adversaire digne d’elle. Amusée, elle mit plus d’entrain à faire sa conquête. Encouragé, il