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Les gardes-du-corps se retirent. À peine sont-ils à cinquante pas, qu’ils font volte-face, et accueillent d’une salve la milice nationale, qui riposte, et en couche plusieurs sur le carreau. Ils fuient, et sont rencontrés par un détachement de citoyens, qui les empêche d’entrer dans leur hôtel ; ils regagnent la place par la rue de l’Orangerie, et se réfugient dans la grande cour, dont ils cadenassent les grilles.

Tout était prêt pour la fuite de la famille royale à Metz. Des relais avaient été placés sur la route. Des voitures, lourdement chargées, s’étaient présentées aux grilles du Dragon et de l’Orangerie, dont on leur avait refusé l’ouverture. Des voitures attelées tout le jour dans les écuries de la reine, n’attendaient plus qu’un moment favorable pour disparaître. On leur en ôta les moyens, en plaçant partout de bonnes gardes, et en occupant toutes les avenues.

On venait d’arrêter un courrier du comte d’Estaing, qui allait à Paris[1], et les voitures du prince de Beauvau, qui se rendaient au château. En même temps, la milice nationale apprit qu’on faisait avancer 600 Suisses ; elle envoya à leur rencontre pour les empêcher d’entrer dans Versailles, et elle resta sous les armes, malgré la pluie. À neuf heures et demie, la troupe légère parisienne se réunit à la milice de Versailles. Elle fut suivie, deux heures après, par l’avant-garde de l’armée. À son approche, les gardes-du-corps se retirèrent dans la cour des Princes. On alluma de grands feux dans la place d’armes, et les Parisiens mirent en liberté le régiment de Flandre, qui fit corps avec eux. Sur les deux heures, l’armée entière se présenta à la grille du château, qui fut ouverte ; les gardes-du-corps prirent la fuite, et se sauvèrent à Rambouillet par la porte de l’Orangerie, après en avoir poignardé la sentinelle.

Le commandant-général s’était rendu chez le roi ; il fit

  1. On présume avec fondement que ce courrier était envoyé au-devant des Parisiens, pour leur annoncer que tout était arrangé, et que leur présence n’était plus nécessaire. (Note de Marat)