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Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/144

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laquelle le peuple s’est soulevé contre ses oppresseurs, et aux scènes sanglantes des coupables qu’il a immolés.

À la vue de ces actes d’une trop juste vengeance, nos perfides ennemis, glacés d’effroi, ont suspendu quelques jours leurs odieuses machinations, pour se réunir aux représentants du peuple ; et les anciennes barrières qui séparaient les ordres de l’État se sont enfin abattues devant les lois éternelles de la raison et de la justice. Ils ont vu en silence renverser de redoutables monuments de tyrannies, eux-mêmes ont feint de s’empresser d’en arracher quelques pierres : mais à peine leur a-t-on donné le temps de revenir de leurs transes, qu’ils n’ont songé qu’à en retarder la chute, qu’à employer mille artifices pour leurrer les citoyens, qu’à tramer une seconde conspiration.

C’est au sein des factions formées contre la liberté naissante que furent posées les bases de la constitution ; c’est au milieu du tumulte et des orages qu’en fut élevé l’édifice, édifice pompeux que nos ennemis travaillent sans cesse à renverser ; tantôt ils le minent sourdement, tantôt ils le sapent audacieusement, suivant que la fortune leur paraît plus ou moins propice.

Le peuple venait de briser ses fers, et il avait les armes à la main. Enivré d’un faux triomphe, déjà il se croit libre et indépendant ; mais tandis qu’il chante sa victoire, les ennemis de son bonheur, livrés à leur rage, renouent en silence les fils de leur trame odieuse. Au lieu de se choisir des chefs éclairés et intègres, il souffre que de vils intrigants se fassent nommer ses mandataires, et leur remet ses pouvoirs, s’abandonne à leur foi, et s’endort stupidement dans leurs bras : mais bientôt abusant de l’autorité qu’il leur a confiée, et tournant contre lui les armes qu’il leur a remises, ils lui enlèvent sourdement ses droits ; et, pour le réduire plus sûrement sous le joug, ils travaillent à le faire périr de faim. L’abîme est ouvert ; s’il n’y est pas encore précipité, qu’il rende grâce à quelques amis incorruptibles de la patrie, qui ont dévoilé l’horrible com-