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désigné, où on leur donnerait de l’argent, en leur disant ce qu’on exigeait d’elles dans la soirée. Le bureau fut ouvert ; un citoyen du district de Sainte-Opportune en informa le comité de police ; deux commissaires, accompagnés de fusiliers, s’y rendirent, ils écoutèrent à la porte : une femme, qui exigeait vingt-cinq louis, finit par en accepter un ; une autre, qui demandait un louis, se contenta de douze livres ; elles s’engagèrent à demander l’Ami du Peuple lorsqu’il serait à la ville, pour le traîner au réverbère. Donneurs et receveurs d’argent furent conduits au comité ; ceux-ci déclarèrent tout ; on leur demanda s’ils auraient tenu parole ? Oh bien oui ! répondirent-ils, nous avons pris leur argent, et nous le boirons à la santé de l’Ami du Peuple. Leur déposition reçue, on les conduisit au comité municipal des recherches ; or, je réponds bien que ce beau tribunal, qui s’est signalé jusqu’ici en recherchant les bons patriotes qui ont puni les traîtres de la garde du roi, ne rompra jamais le silence sur ces petites manœuvres des municipaux.

Le lendemain matin, 22 janvier, le Châtelet renouvela la force du décret officiel. On craignait que le peuple, qui ne s’était pas laissé corrompre, ne s’opposât à mon enlèvement ; on craignait d’éprouver de la résistance de la part du district des Cordeliers. Le commandant-général eut ordre d’appuyer le Châtelet avec des forces suffisantes ; douze mille hommes furent commandés, trois mille tant fantassins que cavaliers, entremêlés à cinq mille espions, investirent le territoire du district ; l’infanterie occupait les principales rues de l’arrondissement, depuis le carrefour de Bussy jusqu’au Théâtre Français ; la cavalerie occupait la place de la Comédie ; un gros de cavalerie, placé au bas du Pont-Neuf, et un corps de garde soldé, posté devant le péristyle du Louvre, étaient prêts en cas de besoin, tandis que six mille hommes, postés à l’entrée des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marcel, devaient empêcher les habitants d’accourir.

Plusieurs districts avaient refusé de se prêter à cette