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membres, elles ont concouru aux vues de l’administrateur des finances, avec le zèle aveugle des valets de la cour ; et partout cette coupable connivence a excité de vives réclamations. Qu’en est-il résulté ? — Toujours faites à la municipalité parisienne ou à l’Assemblée nationale, elles ont presque toujours été étouffées à l’instant même.

Dans le nombre des réclamations qui ont fixé l’attention publique, est celle des habitants de Vernon. Qui n’a point entendu parier de l’accapareur Plantère[1] ? Mais les efforts redoublés des municipaux parisiens pour le soustraire au châtiment ; mais les mensonges qu’ils se sont permis pour dénaturer l’affaire ; mais les impostures qu’ils ont forgées pour voiler ce mystère d’iniquité ; mais les ressorts honteux qu’ils ont fait jouer pour tromper le public, ne sont connus que de quelques observateurs.

En voici un exposé succinct. Dès l’instant que l’administration de l’hôtel-de-ville apprit que le sieur Plantère était arrêté par les citoyens de Vernon, alarmée des suites qu’aurait l’indiscrétion du détenu, et ne songeant plus qu’à l’arracher de leurs mains, elle fit partir à la hâte un détachement de trois cents gardes-nationaux, sous les ordres du sieur d’Hières[2], commandant de bataillon du district des Petits-Augustins, auxquels se joignirent les grenadiers du régiment de Flandre, et deux compagnies de dragons de Montmorency. Arrivé sur les lieux, cet indigne commandant, d’après les ordres qu’il avait reçus du général[3], fit

  1. Planter était chargé de veiller, à Vernon, sur les approvisionnements destinés à Paris. Au cours des troubles qui éclatèrent à Vernon dans les derniers mois de l’année 1789, Planter fut pendu deux fois, et chaque fois il fut délivré avant la fin de son supplice. Sur ces incidents de Vernon, sur la personnalité de Planter, sur les violences dont il fut l’objet, et sur la répercussion qu’eurent ces événements à la Commune de Paris, voir Sigismond Lacroix, Actes de la Commune de Paris, II, pp. 506-509, 529-530, 563, 575, III, pp. 441-442, 459-461.
  2. Dières.
  3. Pour justifier ces ordres barbares, le marquis de La Fayette,