Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/213

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administration, tremblant de voir enfin ses malversations exposées au grand jour, il a joué de son reste ; et couronnant sa carrière par le dernier des forfaits, il a tout mis en œuvre pour fatiguer les citoyens de leur liberté naissante, pour les travailler par les terreurs de la famine, pour les soulever par des vexations inouïes, pour les réduire au désespoir, pour intimider l’Assemblée nationale par la crainte des dissensions civiles, pour faire abandonner aux pères de la patrie le dessein généreux de porter le flambeau dans les détours ténébreux de l’antre ministériel, pour leur arracher des décrets qui consolident ses nouvelles spéculations, et l’affermissent dans sa place. Mais pour empêcher les ressorts usés de la machine politique de rompre, aller en avant et rester maître de l’État, il fallait remplir les coffres. D’abord il entreprit le monopole des grains ; puis il imagina la contribution patriotique, nouveau genre d’impôt[1], dont presque tout le poids porte sur le peuple qu’il voulait écraser ; enfin il eut recours à l’accaparement du numéraire, qui lui offrait le double avantage, et d’avoir à ses ordres une armée de satellites dévoués[2],

  1. Pour pouvoir l’appliquer à ses desseins, il lui importait que le produit n’en fût pas connu, et il a pris des mesures pour le cacher. Les dons patriotiques présentés à l’Assemblée nationale se trouvent-ils bien couchés sur ses registres : mais ceux qui ont été portés directement à la monnaie, en connaît-on le montant ? S’il est vrai, comme on l’assure, que les préposés refusaient d’en donner des reçus. Au demeurant, que sont devenus les dons faits à l’État ? Pères de la Patrie, vous en avez laissé le maniement au ministre des finances qui en a disposé à son gré, vous lui avez remis les clefs du trésor public, et vous vous êtes bornés au triste rôle de receveurs. (Note de Marat)
  2. Il est constant que le corps entier des officiers de l’armée, à quelques individus près, est au désespoir de la révolution. J’ai, là-dessus, des preuves non équivoques. Heureusement les soldats sont presque tous dans des dispositions contraires. (Note de Marat)