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Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/235

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enfante aussi la vérité qui les étouffe. L’erreur ne règne que parce qu’il n’est pas permis de mettre la vérité aux prises avec elle. Non, il n’est point de plus grand fléau pour l’humanité que l’ignorance ; c’est d’elle que naquirent tous les préjugés funestes, les préjugés destructeurs. Empêchez la libre communication des idées, bientôt le champ de la politique ne se couvre plus que des plantes vénéneuses qu’il plaît aux tyrans d’y laisser germer. Car, après avoir établi qu’il est des opinions criminelles, ils érigent aussitôt un tribunal pour les réprimer ; dès lors, ce n’est plus ce qui est dangereux qui est puni, mais ce qui offusque ce tribunal : inconvénient terrible qui perdit toujours la liberté.

Il est donc souverainement important de n’opposer d’autre barrière aux opinions insensées, aux faux systèmes, que les armes d’un esprit éclairé. Que toutes les opinions aient donc le champ libre ; peu à peu la vérité germera au milieu d’elles ; puis, s’élevant tout à coup comme une reine majestueuse, elle régnera seule avec l’empire irrésistible de la raison.

Ainsi, les discours et les écrits les plus indécents, les plus emportés, les plus violents, les plus atroces, les plus scandaleux, ne peuvent jamais faire des crimes de lèse-nation ; pour commettre ces crimes, il faut agir contre la nation, il faut travailler à lui enlever sa souveraineté, ruiner ses intérêts, porter atteinte à sa liberté, ou mettre son salut en péril.

Concluons de là que les criminels de lèse-nation ne peuvent jamais se trouver parmi les écrivains patriotiques, si souvent l’épouvantail de ces criminels ; mais ils se trouvent à la cour, dans le cabinet ministériel, dans l’assemblée nationale, où ils se montrent avec insolence et impunité. Si on veut des exemples, je citerai la plupart des Capets, tous les ministres, toute l’engeance maudite des noirs et des demi-noirs, notamment les comités de constitution et des finances ; tous les membres du Châtelet,