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Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/99

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stupide de la multitude, qui gémissait sur le renvoi d’un ministre infidèle, comme elle aurait dû gémir sur la perte d’un défenseur.

Persuadé que son appel était le meilleur moyen d’écraser la faction des aristocrates, et de le confondre lui-même un jour, je proposai son rappel dans un moment où personne n’y songeait encore. Une lettre qui fut écrite à l’ancienne municipalité, le jour même de la prise de la Bastille, et qui resta dans les mains du vice-président du district des Carmes Déchaussés, en fait foi.

À peine M. Necker fut-il rappelé, que je suivis d’un œil inquiet toutes ses démarches, toutes ses opérations. Il n’en est aucune qui ne m’ait confirmé dans mon jugement ; et le premier ministre des finances, toujours chéri, toujours encensé, toujours adoré par l’aveugle multitude, n’a plus été à mes yeux qu’un administrateur indigne, qui avait lâchement abandonné les intérêts de la nation pour ceux du monarque ; mais je n’ai éclaté que lorsque les preuves de son infidélité m’ont paru complètes. Je ne crains donc plus de le dénoncer comme ennemi public. Ceux qui s’intéressent à l’ami du peuple tremblent déjà pour lui ; mais il est tranquille, il ose prétendre au titre de philosophe, et il croit le mériter.

Il est temps de mettre mes preuves sous les yeux du public. Je les déduirai[1] avec impartialité, je jugerai M. Necker, comme la postérité le jugera un jour, et je ne serai ici qu’un historien fidèle qui aura devancé son siècle.

Je commence par quelques circonstances de cette horrible conspiration.

Premier chef d’inculpation

Depuis longtemps la capitale était le centre des lumières, des forces et des efforts du parti patriotique : c’est contre

  1. Il y a dans le texte « détruirai ».