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Page:Marbeau Le charme de l histoire 1902.djvu/133

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dufort de cheverny

Le désordre est en effet à son comble. Partout la désorganisation, le trouble, l’inquiétude, la souffrance, le mécontentement. Les employés de l’État, mal payés, font main-basse sur les deniers publics : « La République est volée partout ; c’est un vrai brigandage » (II. 395). Le commerce est arrêté ; il n’y a plus de numéraire, et les faux se multiplient tellement que personne n’ose plus accepter de lettres de change (II. 394). Les ci-devant nobles sont frappés par des mesures d’exception qui les mettent en dehors de la loi commune. Les propriétaires redoutent la loi agraire qui paraît imminente (II. 365). Les gens sans aveu, que l’espoir du pillage avait jadis rattachés à la Révolution, s’aperçoivent qu’ils ne sont pas plus riches qu’auparavant, et crient contre le nouvel ordre de choses (II. 381). La sécurité est nulle : des bandes de chauffeurs répandent l’effroi dans les campagnes. La guerre civile désole les départements voisins et menace le Loir-et-Cher. À chaque instant on croit voir arriver les Chouans. Les gens paisibles redoutent leur approche ; mais quelquefois on les appelle pour se venger des exactions révolutionnaires. Au Mans, le Gouvernement ayant prétendu user de violence pour exiger le paiement d’un emprunt forcé, la ville se livre aux Chouans qui fusillent le commissaire du pouvoir exécutif (II. 417). Les conscrits, que l’on rassemble par force et que l’on emmène au corps « liés et