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la taxe des pauvres à abbeville

valeur. M. de Brandt ne nous dit pas si la taxe y était aussi impopulaire que dans d’autres villes. À Paris, notamment les commissaires chargés de la percevoir étaient si mal reçus, quelquefois si maltraités, que souvent ils refusaient leur office, et que, pour les décider à l’accomplir, il fallut à certaines époques les menacer de fortes amendes. C’était toujours, on le voit, le même système : qu’il s’agît de celui qui répartissait la taxe, ou de celui qui la recouvrait, ou de celui qui la payait, la contrainte était la loi à laquelle tous étaient soumis.

Nous ne doutons pas qu’aujourd’hui, les aumônes données volontairement aux pauvres d’Abbeville par la charité libre des habitants ne dépassent le chiffre obtenu péniblement jadis par la taxe obligatoire. Il y a certainement à Abbeville plus de cinq familles dépensant chaque année 312 francs en aumônes, et les pauvres de la ville reçoivent certainement plus de 22.910 francs par an.

Louis XIV maintint le principe de la taxe des pauvres dans son édit de 1656 qui créa l’hôpital général. Il voulut même en faire une nouvelle application en établissant une taxe spéciale au profit de cette institution. Mais le Parlement, en enregistrant l’édit, refusa d’admettre la taxe nouvelle, sauf en tant qu’elle frappait les chapitres et les communautés ; quant aux bourgeois, ils ne pouvaient être taxés qu’en cas de nécessité.