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le charme de l’histoire

Autour de Granvelle s’agitaient, avec les passions et les faiblesses qui expliquent leur destinée, d’autres personnages, secondaires dans les récits de M. Wie­sener, mais dont l’histoire ou la poésie ont consacré les noms. Au premier rang, l’étrange Philippe II. Avec étonnement nous le voyons en Flandre, pendant les premières années de son règne, jovial et bon vivant, aimant le plaisir, la table, les intrigues galantes, les mascarades et les courses nocturnes par les rues des villes avec ses gentilshommes et ses bouffons, presque devenu Flamand, si c’est s’assimiler à un peuple que d’en prendre les défauts. Plus tard, en Espagne, rendu à sa vraie nature, il apparaît sombre et dissimulé, jaloux de son autorité et ne sachant pas vouloir ; n’ayant, comme l’écrivait à Granvelle son frère Chantonay, « d’autres résolutions que de demeurer perpétuellement irrésolu » ; érigeant en règle de conduite, comme nous le faisons tous, l’infirmité de son caractère, répétant avec satisfaction, pour reculer le moment de prendre un parti : « Le temps et moi, nous en valons deux ! Marguerite de Parme, énergique et virile, véritable homme d’État comme son père Charles-Quint, aussi décidée que Philippe était lent et indécis. Le duc d’Albe, encore au second plan, voulant déjà couper des têtes ! Egmont, brillant et vain, plus soldat que politique. Guillaume d’Orange, plus politique qu’homme de guerre, général habile plus que soldat vaillant ;