Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/60

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torique chez MM. Jacob et Chabrier. Ni l’un ni l’autre ne sont bien encourageants, avec leurs sermons pour l’engager à dépouiller “sa vieille peau d’écolier.”

“Sa vieille peau d’écolier”, Marcel Schwob l’a dépouillée depuis longtemps, on le verra ; mais ses maîtres l’ignorent : “M. Chabrier reste aussi grincheux qu’avant et M. Jacob aussi bavard. Il passe quelquefois une heure trois quarts à nous expliquer un sujet qu’il aurait pu nous donner.” L’enfant s’épuise et s’ennuie à résumer les cent vingt-cinq pages de M. Martha sur la philosophie stoïcienne ; les sermons de Bossuet et les Provinciales de Pascal le font dormir debout. Il trouve absurdes les sujets de compositions qu’on lui propose ; mais il est tout de même un très bon élève, comme M. Chabrier l’a dit au proviseur. Ses progrès ont été rapides et il commence à envoyer de la copie au journal paternel, le Phare.

M. Chabrier, croyant le prendre en faute, lui a fait expliquer brusquement un texte difficile de Plaute, le dialogue de Mercure et de Sosie dans Amphitryon : “Comme j’expliquais très couramment, lisant le latin et disant immédiatement la phrase française, il me dit : “Vous avez préparé, ou du moins vous en avez l’air ; peut-être expliquez-vous Plaute couramment, je n’en sais rien” : ce qui m’a fait grand plaisir, car enfin il faudrait être d’une bonne force pour expliquer Plaute à livre ouvert.” Marcel Schwob ira cette année-là au Concours Général et passera son bachot.

Mais c’est aussi le temps où il a commencé, pour son plaisir de lire Catulle, de le rendre en français du temps de Marot ; et il esquisse le très joli et original roman de Poupa sur la vie latine. Cela, MM. Chabrier et Jacob ne le sauront jamais.

Marcel Schwob devait faire sa philosophie entre 1883 et 1884, sous M. Burdeau.

C’était le philosophe célèbre, le politicien qui plia toute une génération au kantisme. Maurice Barrès et Léon Daudet ont évoqué sa physionomie et dit son influence. Marcel Schwob, qui savait très bien l’allemand et qui pouvait lire Kant dans le texte, aurait dû plaire à Burdeau ; mais la sensibilité de l’adolescent ne s’accorde pas du tout avec l’enseignement du maître. Marcel écrit à sa chère maman bien-aimée : “M. Burdeau est un très bon professeur, mais très raide, et qui donne un travail épouvantable.” Il écrira encore : “M. Burdeau nous fait de l’économie politique à haute dose, il nous bourre de métaphysique. Pour mon compte, je suis en train de lire Schopenhauer et de me demander d’où vient son immense réputation. C’est bien faible, comme philosophie…” — “M. Burdeau s’est donné de la rogne contre ma dissertation qui ne