Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/221

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Chapitre I

(1) Assuré des bonnes dispositions des soldats, qui rivalisèrent d’ardeur en prenant, suivant l’usage, Dieu à témoin que leur prince chéri était invincible, Julien jugea qu’il était temps de frapper les grands coups. Après une nuit donnée au repos, il fit sonner le départ dès l’aurore, et entra avec le jour en Assyrie, non sans avoir à l’avance tout disposé pour subvenir aux difficultés de l’entreprise. On le voyait, l’œil en feu, courir à cheval de rang en rang, donnant à tous l’exemple de l’ardeur et du courage.

(2) La connaissance des lieux lui manquait ; et comme l’ennemi pouvait en profiter pour lui tendre des pièges, il fit dès le début, en chef instruit par l’expérience, prendre aux troupes l’ordre de marche par carrés. Avant tout il avait distribué sur son front et ses flancs quinze cents coureurs, pour éclairer le pays et prévenir toute surprise. Se tenant lui-même au centre avec l’infanterie, qui formait la force principale de l’armée, il prescrivit à Névitte de longer l’Euphrate à sa droite avec quelques légions. La cavalerie à la gauche, sous les ordres d’Arinthée et d’Hormisdas, s’avançait sur un sol uni par escadrons serrés. Dagalaif et Victor commandaient l’arrière-garde, et la marche était fermée par Sécondin, duc d’Osrhoène.

(3) Enfin, pour grossir son armée aux yeux des ennemis, et frapper leur imagination de l’idée d’une force supérieure, il eut soin d’espacer les divisions et les rangs de manière à ce que la colonne couvrit près de dix milles de terrain entre le front de marche et les derniers serre-files ; manœuvre très fréquemment et très habilement mise en pratique par Pyrrhus, roi d’Épire, le plus savant des généraux dans l’art de tirer parti du terrain, d’étendre ou resserrer son ordre de bataille, et de multiplier pour l’œil ou diminuer ses forces, suivant le besoin.

(4) Les intervalles des corps furent remplis par les bagages, les valets, et tout ce qu’une armée traîne à sa suite, et qui, laissé en prise, peut être enlevé d’un coup de main. La flotte, malgré les sinuosités du fleuve, dut aller