Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le reste de nos troupes, eut bientôt fait retraite.

Chapitre V

(1) L’armée, poursuivant sa marche, traversait une succession de bocages et de terres en rapport, offrant la culture la plus variée. Là se trouvait un palais d’architecture romaine, qui dut sa conservation au plaisir que sa vue nous causa.

(2) Nous trouvâmes aussi un parc d’un immense circuit, défendu par une forte palissade, et qui contenait les animaux destinés aux chasses royales. On y voyait des lions à la longue crinière, des sangliers armés de redoutables défenses, des ours tels qu’on n’en trouve qu’en Perse, d’une férocité inimaginable, et d’autres échantillons de monstres des forêts, choisis dans les différentes espèces. Nos soldats forcèrent les portes de l’enceinte, et tuèrent tous ces animaux à coups d’épieux et à coups de flèches.

(3) L’empereur campa et se fortifia à la hâte dans ces lieux si beaux et si bien cultivés, et, y trouvant à portée de l’eau et des fourrages, y fit reposer l’armée deux jours. La ville de Coché, que nous appelons Séleucie, détruite par l’empereur Vérus, est à peu de distance. Julien, prenant les devants avec des éclaireurs, en visita l’enceinte déserte. Une source qui ne tarit point y forme un lac qui se décharge dans le Tigre. Là il vit de nombreux cadavres attachés au gibet : c’étaient les parents du gouverneur qui avait, comme on l’a vu plus haut, capitulé dans Pirisabora.

(4) Ce même lieu vit le supplice de Nabdatès, fait prisonnier avec quatre-vingts des siens, lors de la prise de Mahozamalcha, et qui périt sur un bûcher. Il avait obtenu sa grâce, bien qu’il eût obstinément défendu la ville après avoir promis sous main de nous la livrer. Mais ce pardon inespéré l’avait rendu Insolent au point de perdre toute retenue dans les propos qu’il tenait contre Hormisdas.

(5) Nous essuyâmes un échec peu après notre départ. Une avant-garde de trois cohortes rencontra un parti ennemi sorti de Ctésiphon, et, tandis qu’on était aux mains, un autre détachement passa le fleuve, enleva les bêtes de somme de la suite, et nous tua quelques fourrageurs surpris à l’écart.

(6) Julien, la rage au cœur, se dirigea sur Ctésiphon. Un château situé sur un point élevé, et muni de fortes défenses, arrêta sa marche. Il fit à cheval, et faiblement accompagné, une reconnaissance autour de cette forteresse mais, s’étant imprudemment avancé jusqu’à portée des traits, il fut remarqué. Une volée de projectiles tomba soudain autour de lui et blessa son écuyer, qui le touchait presque. Il eût été lui-même atteint d’un javelot de rempart, si tous, s’empressant de le couvrir de leurs boucliers, ne l’eussent préservé d’un danger imminent.

(7) Cette insulte lui causa une irritation extrême, et le décida à mettre le siège devant ce fort Mais la garnison préparait une vigoureuse défense, comptant sur sa position presque inaccessible, et sur l’arrivée prochaine du roi, que l’on disait en marche avec des forces imposantes.

(8) Les mantelets et les autres apprêts de siège furent bientôt terminés. Mais les assiégés, qui par le clair de lune suivaient nos opérations du haut de leurs remparts, firent tout à coup une sortie en masse vers la seconde veille, et taillèrent en pièces une de nos cohortes qu’ils surprirent. Le tribun qui la commandait fut tué en combattant.

(9) Au même instant la manœuvre