Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/256

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qui lui rendirent compte de leur mission. D’abord, suivant l’ordre des faits, Lucillien s’était rendu à Milan avec les tribuns Séniauchus et Valentinien ; et, apprenant que Malaric refusait le commandement qui lui était offert, il en était reparti en diligence pour Reims.

(7) Là, son zèle l’avait écarté de la prudence. Agissant comme en temps de sécurité profonde, il s’était lancé dans une intempestive discussion de comptes avec l’intendant. Celui-ci, qui avait à se reprocher des infidélités et des fraudes, s’était enfui dans un cantonnement, où il avait répandu le bruit que Julien n’était pas mort, et qu’un individu sans consistance organisait un mouvement contre lui. Cette fable avait excité parmi les troupes une fermentation violente, dont Lucillien et Séniauchus avaient été victimes. Valentinien (le futur empereur), tremblant pour ses jours, n’avait su d’abord où se réfugier. Mais, grâce à son hôte Primitivus, il avait trouvé les moyens de disparaître.

(8) Par compensation à ces fâcheuses nouvelles, ils ajoutèrent qu’une députation de chefs d’écoles (ainsi qu’ils sont désignés dans la hiérarchie militaire) allait arriver de la part de Jovin, pour lui annoncer que son pouvoir était reconnu par l’armée des Gaules.

(9) Valentinien était revenu avec les deux commissaires. Jovien lui donna le commandement des scutaires de la seconde école. Il fit entrer aussi dans les gardes du palais Vitalien, qui servait comme soldat dans les Hérules. Plus tard on fit de cet officier un comte, et il reçut en Illyrie une mission dont il s’est mal tiré. Jovien ensuite s’empressa d’envoyer Arinthée dans les Gaules, avec une lettre pour Jovin. Il confirmait ce dernier dans son poste, et l’engageait à lui rester fidèle. Il lui enjoignait de punir l’auteur de la sédition, et d’envoyer à la cour, chargés de chaînes, tous ceux qui y avaient figuré en première ligne.

(10) Après ces premières dispositions jugées nécessaires, il se rendit à Aspuna, petit municipe de la Galatie, pour donner audience à la députation de l’armée des Gaules. Il y reçut les députés en conseil, accueillit gracieusement les nouvelles dont ils étaient porteurs, et les renvoya sous leurs drapeaux, chargés de présents.

(11) À Ancyre, l’empereur, avec un cérémonial tel que le permettaient les circonstances, prit le consulat avec Varronien son fils, encore presque au berceau. Les cris que poussa cet enfant en se débattant pour n’être pas placé dans la chaise curule, comme le veut l’usage, semblaient présager l’événement qui ne tarda pas à arriver.

(12) Jovien approchait à grands pas du terme assigné à sa carrière. La nuit de son arrivée à la ville de Dadastane, qui marque la limite entre la Galatie et la Bithynie, il fut trouvé mort dans son lit ; ce qui donna naissance à une foule de conjectures. On supposait une asphyxie causée soit par un enduit de chaux récemment apposé sur les murs de sa chambre, soit par la vapeur du charbon qu’on y avait allumé en quantité excessive, soit enfin par une indigestion, résultat d’une intempérance de table. Il avait alors trente-trois ans. Cette fin ressemble à celle de Scipion Émilien, et l’une non plus que l’autre n’a donné lieu à aucune recherche.

(14) Jovien avait de la dignité dans la démarche, la