Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/702

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manœuvrer sous les armes ; qu’on les passe souvent en revue ; qu’il ne leur soit accordé aucun congé ; qu’au moindre signe, à la moindre parole, ils soient toujours au commandement ; qu’on les exerce sans cesse, et très longtemps, jusqu’à la lassitude, à tirer des flèches, à lancer des javelots, à jeter des pierres à la main ou avec la fronde, à escrimer contre le pieu, à le frapper de pointe et de taille avec l’épée de bois, à courir, à sauter, à franchir les fossés. Si leurs quartiers sont près de la mer ou d’une rivière, qu’on leur fasse apprendre à nager pendant l’été ; qu’on les mène souvent près des lieux escarpés ou fourrés ; qu’on leur fasse abattre des arbres, les dégrossir, creuser des fossés ; qu’ils s’emparent d’un poste, et que pour n’être pas débusqués par leurs camarades ils les poussent boucliers contre boucliers. Des soldats et des cavaliers, soit légionnaires, soit auxiliaires, disciplinés exercés de cette sorte dans leurs quartiers, prendront nécessairement de l’émulation pour la gloire ; et quand on les rassemblera pour une expédition, ils demanderont plutôt le combat que le repos. En général, un soldat qui a de la confiance en ses armes et en ses forces ne pense point à se mutiner ; mais enfin s’il se trouve quelques séditieux dans les légions ou dans les auxiliaires, cavalerie ou infanterie, à commencer par les centurions, leurs lieutenants et les autres officiers, c’est à un général attentif à les découvrir, non par les délations, mais par les voies non suspectes de la vérité ; et pour lors il les éloignera du camp, sous prétexte de quelque commission qui puisse leur faire plaisir ; ou il les enverra servir dans des villes ou des châteaux, mais avec tant d’adresse, qu’en se défaisant d’eux il semble les y envoyer par préférence. Jamais la multitude ne se porte à la révolte par un accord ; elle y est excitée par un petit nombre de mutins, qui fondent l’espérance de l’impunité de leur crime sur le nombre des complices qu’ils s’assurent. Supposé que cette révolte devînt si générale qu’on ne pût la dissimuler, il n’en faut punir que les auteurs, selon l’usage des anciens, qui était de ne châtier qu’un petit nombre, et de faire peur à tous les autres. Au reste, il est bien plus glorieux à un général de maintenir ses soldats dans la discipline par l’habitude de l’exercice et du travail, que de les rendre obéissants par la seule crainte du châtiment.

chapitre v.
Quels sont les différents signaux militaires.

L’homme de guerre a bien des choses à observer dans le combat. Là, la moindre faute qu’il fait est punissable, puisqu’il est question du salut public ; mais rien ne contribue plus à la victoire que d’obéir aux signaux. Il n’est pas possible que, dans le tumulte de l’action, la voix d’un seul homme dirige les mouvements d’une armée ; il est obligé de changer souvent ses ordres, à mesure que les circonstances changent ; ce qui a fait établir chez toutes les nations des signaux, par lesquels toute une armée peut connaître et exécuter les ordres de celui qui la commande. Nous en avons de trois espèces, qu’on peut distinguer par vocaux, demi-vocaux et muets : les deux premiers frappent l’oreille ; les derniers frappent les yeux. Les vocaux, ainsi