Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/739

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leurs flottes de navires semblables. Tous les vaisseaux de guerre se construisent à présent sur le même modèle, et s’appellent liburnes, du nom de la Liburnie. Cette province fait partie de la Dalmatie, et a pour capitale la ville de Jadère.

chapitre iv.
Du soin avec lequel sont construits les vaisseaux liburniens.

Si pour bâtir une maison on recherche la qualité du sable et des pierres, on doit être d’autant plus attentif sur le choix des matériaux pour la construction des liburnes, qu’il y a plus de danger à monter un mauvais navire qu’à habiter une maison mal bâtie. On construit les liburnes principalement avec le cyprès, le pin cultivé ou sauvage, le mélèze et le sapin ; et les clous de cuivre valent mieux pour en attacher les pièces, que ceux de fer. Quelque grande qu’en paraisse d’abord la dépense, on y gagne cependant sur la durée. Les clous de fer exposés à l’air et à l’humidité sont bientôt détruits par la rouille ; au lieu que ceux de cuivre se conservent en leur entier, même dans l’eau.

chapitre v.
Des règles à suivre pour la coupe des bois.

Il faut surtout observer de couper les arbres, pour la construction des liburnes, depuis le quinze de la lune jusqu’au vingt-trois : le bois coupé dans l’intervalle de ces huit jours se conserve parfaitement ; coupé dans tout autre temps, il est sujet à être mangé par les vers, et se pourrit dès l’année même : ce qui est fondé sur les principes de l’art, confirmé par la pratique constante de tous les architectes, et consacré par la religion d’éternelle vérité, dont les fêtes ne se célèbrent que pendant ces jours-là.

chapitre vi.
Dans quel mois on doit couper les bois.

Les bois de marine se doivent couper après le solstice d’été, c’est-à-dire pendant les mois de juillet et d’août, et depuis l’équinoxe d’automne jusqu’au premier de janvier : la sève ne donnant plus dans ces mois-là, le bois en est plus sec et plus dur ; cependant il ne faut pas le travailler aussitôt qu’il a été abattu, ni le mettre en œuvre pour les navires dès qu’il a été scié. Les arbres abattus doivent demeurer un certain temps sur terre sans qu’on y touche ; et les pièces de marine qu’on en a tirées veulent aussi être attendues. Si on ne les laisse pas sécher, la sève qui n’en est point encore sortie les fait gercer : de là les voies d’eau, si dangereuses en mer.

chapitre vii.
De la grandeur des liburnes.

Quant à la grandeur des bâtiments, les plus petites liburnes ont un seul rang de rames, les médiocres, deux, et celles d’une juste grandeur, trois, quatre, et quelquefois cinq. Cela ne dont pas paraître si énorme, puisqu’on rapporte qu’au combat d’Actium il y avait de beaucoup plus