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L’ÉCONOMIE POLITIQUE.

MADAME B.

Rarement, je crois, excepté quand l’argent est plus demandé que les marchandises ; car, indépendamment des opérations des banquiers, il y a d’autres moyens de prévenir cette dépense. Quand les marchands anglais qui exportent des marchandises en Russie, s’aperçoivent que l’excès des importations sur les exportations produit une rareté de lettres sur la Russie, et qu’en conséquence ils peuvent vendre ces lettres avec bénéfice aux marchands occupés d’importer, cette addition survenue aux profits ordinaires de leur commerce les engage à augmenter leurs exportations. Cette prime a tout l’effet d’une gratification ; car elle permet d’exporter des marchandises, qui auparavant ne donnaient pas assez de profits pour que l’on pût les exporter. Au contraire nos marchands qui importent les marchandises russes, se voyant obligés d’acheter ces lettres de change avec une prime (qui a pour eux l’effet d’un impôt), bornent leurs importations aux marchandises qui peuvent donner les profits ordinaires de ce commerce, après avoir déduit la prime qu’ils ont été forcés de payer.

CAROLINE.

Les primes perdues par le marchand qui importe sont donc gagnées par celui qui exporte. Cela ne peut manquer d’encourager l’exportation et de décourager l’importation ; et par-là même de rétablir l’équilibre du change.

MADAME B.

Ainsi le mal d’un change défavorable produit immédiatement le remède, et tend à maintenir l’égalité entre les exportations et les importations. Mais pour que cet effet fût complètement obtenu, il faudrait que le pays avec lequel le change est défavorable demandât autant de nos produits que nous demandons des siens, ce qui n’est pas toujours le cas. Le change défavorable toutefois permet au marchand exportateur de vendre au dehors ses marchandises au plus bas prix, parce qu’une partie de ses profits provient de la prime sur le change ; par ce moyen, un plus grand nombre de personnes dans l’étranger se trouvant en état d’acheter au prix réduit, le marché pour ces marchandises acquiert plus d’étendue, et la quantité qui s’en consomme est beaucoup plus considérable.