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NOS TRAVERS

Il y aurait pourtant une différence à faire entre les écoles des grandes villes et celles des districts ruraux.

La population de ces derniers a des besoins différents, et les raffinements qu’on introduit dans l’éducation de ses enfants n’aboutissent qu’à faire des déclassées qui sont le malheur et la ruine des familles.

Un notaire de ma connaissance a vu plus d’une fois un pauvre cultivateur venir hypothéquer sa terre pour acheter un piano à sa fille. Que ne leur montre-t-on plutôt à tricoter, à tisser, à raccommoder, à tailler, à coudre, à broder comme dans les écoles primaires de France ? Et s’il faut aborder la science, s’il faut sacrifier à l’art, que ce soit donc au moins d’une façon profitable.

Un peu de chimie vulgaire, quelques connaissances médicales rudimentaires si précieuses dans les habitations isolées de la campagne, des notions pratiques d’histoire naturelle vaudront mieux que l’algèbre et l’astronomie.

Les quelques familles en dehors des grands centres, qui souhaiteraient pour leurs filles une éducation plus accomplie, ne feraient pas autrement qu’elles font presque toutes aujourd’hui : elles porteraient leur clientèle aux couvents des villes.

Pour ce qui est des arts, il en est d’utiles qui ne coûtent rien à celles qui les pratiquent, qui peuvent au contraire leur rapporter quelque chose et devenir un métier lucratif dans le cas où l’on viendrait à dépendre de soi-même pour sa subsistance.

Il y aurait, par exemple, une industrie à créer ou à implanter parmi nous : c’est celle de la dentelle ; et la maison d’éducation, l’institution enseignante qui voudrait en prendre l’initiative aurait un rôle bienfaisant à accomplir dans notre pays.

Ce qui nous manquent totalement ce sont encore des établissements pour former à leur état les serviteurs. Chaque métier a son apprentissage, seul celui de cuisinière ou de servante se fait aux dépens des patrons.