Page:Marchand - Nos travers, 1901.djvu/97

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dans le choix à faire et elle multipliera les occasions de choisir.

Car, en effet, votre mérite, la culture de votre esprit, l’agrément de votre conversation, joignant leur charme au prestige de votre indifférence, feront trouver à vos parents les gendres qui abonderont d’autant plus qu’ils seront moins désirés.

Que, par le fait des circonstances exceptionnelles, les partis ne viennent cependant pas, il vous reste au moins avec la satisfaction de n’avoir perdu ni votre temps ni vos peines, cette incomparable joie d’une indépendance qui se suffit à elle-même et fait trouver en dehors de la vie conjugale, des objets — bonnes œuvres, études ou voyages — capables d’intéresser l’esprit et le cœur.

Si vous êtes déshéritées de la fortune et que les maris n’accourent toujours pas, vous avez encore, dans les études qui auront charmé vos loisirs, trouvé les moyens de pourvoir à votre propre subsistance.

Car les filles pauvres doivent être pénétrées de cette vérité : On trouve plus de paix, plus de satisfaction, mille fois moins d’amertume à gagner soi-même son pain, qu’à le partager dans une union mal assortie avec un conjoint qu’on ne saurait ni aimer ni estimer. Il n’est pas rare de rencontrer le bonheur au foyer de celle qui travaille pour vivre, tandis que tous les maux inventés par la discorde, joints souvent, à ceux qu’engendre la misère, sont le partage des femmes mal mariées.

C’est que — voilà encore une chose que nos désœuvrées ne soupçonnent pas, — le travail, le saint travail, porte avec lui sa récompense. Il arrose de ses sueurs fécondes le sillon d’où germent les plus parfaites consolations, les meilleures joies humaines.

Un peintre célèbre, Delacroix, vante l’allégresse qui est l’accompagnement du travail, « C’est, dit-il, la plus grande récréation que je puisse me donner. J’oublie à mon chevalet les ennuis et les soucis qui sont le lot de