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FIANCÉS

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On est convenu de dire beaucoup de bien de la manière dont se font en ce pays les alliances. Par contre, il est de mise de critiquer celles qui s’appellent mariages de raison.

Ces mariages en effet sont tout-à-fait à l’antipode des nôtres. Malgré la préférence généralement accordée à ces derniers, j’hésite cependant à suivre le courant et à trouver nos coutumes excellentes.

Dites-moi vous-mêmes ce qui vous paraît meilleur d’un mariage de raison ou d’un mariage… déraisonnable. Les mariages d’amour courent de grands risques de mériter ce qualificatif.

À la réflexion on comprend que les premiers soient plus sûrs, justement parce qu’on s’y fait « une raison » et qu’on suit non pas un entraînement aveugle, mais l’inspiration de la sagesse.

Et tenez, voulez-vous que je vous le dise franchement ? Au fond, je n’aime ni les uns ni les autres et sur ce chapitre je suis partisan du juste milieu. L’une de ces unions ressemble trop à un calcul, l’autre trop à une folie.

Ne blasphémons pas contre Cupidon, et donnons-lui son dû en admettant que dans tout bon mariage il doit entrer beaucoup d’amour et un peu de raison.

Seulement, comme il serait téméraire de demander tout cela aux jeunesses qui dans cette affaire sont parties contractantes, il est entendu que les fiancés se chargent de la partie sentimentale et que l’autre ingrédient, c’est-à-dire la part de raison, est fourni par les parents.