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bêtes de charge ; d’autres, étant mis à la charrue, font en peu de temps beaucoup de travail. On recueille en cette province le plus excellent musc qui soit en tout le monde, car il y a en ce pays-là un certain bel animal de la grandeur d’une gazelle, ayant le poil épais comme le cerf et les pieds de même ; il n’a que quatre dents, deux en haut et deux en bas, qui sont longues de trois travers de doigt en dessous de ses lèvres[1]. Or il a près du nombril ; entre cuir et chair, une vessie pleine de sang, lequel sang est ce musc agréable et précieux. Les habitants sont idolâtres, adonnés à leurs sens, gras de corps et ayant un fort petit nez, et se laissant croître le poil sur les lèvres. Les femmes sont blanches et belles. Quand les hommes veulent se marier, ils cherchent plutôt la beauté que la noblesse ou la richesse ; d’où il arrive souvent qu’un grand seigneur épousera une pauvre fille, mais qui sera belle, et assignera de quoi vivre à sa mère. On trouve là beaucoup de négociants et d’artisans. Cette province peut avoir vingt-cinq journées de long et est fort fertile ; il y a une grande quantité de faisans, qui ont la queue de huit ou dix paumes de long. On y trouve aussi plusieurs autres sortes d’oiseaux d’un très beau plumage, mêlés de diverses belles couleurs.

LXIII
De la province d’Égrigaia.


En allant plus avant vers l’orient et après avoir fait sept journées, on rencontre la province d’Égrigaia ( ?) où il y a beaucoup de villes et de châteaux. Elle dépend de la grande province de Tanguth, dont la ville capitale s’appelle Calacia ( ?). Les habitants sont idolâtres, excepté quelques chrétiens nestoriens, qui y ont trois églises. Ils sont tous sujets du Grand Khan. On trouve dans la ville de Calacia des draps qu’on appelle ca-

  1. Le chevrotain à musc (Moschus moschïferus).